Nous attendons toujours la sortie officielle de la circulaire officieuse qui circule (!) actuellement sur la mise en conformité des couvertures prévoyance santé et retraite d’entreprise.
Laurence Lautrette et Elise Bailly, avocates au Cabinet Laurence Lautrette et Associés en ont préparé un commentaire que nous vous mettons en ligne sans attendre sa parution officielle car le temps presse. Il reste moins de 3 mois pour les entreprises qui n’ont pas entamé leur opérations de mise en conformité de leurs couvertures d’entreprises…
Voici nos observations sur ce qu’il faut en retenir :
* Entrée en vigueur :
- Prise d’effet au 1er janvier 2009
- Aucun redressement ne pourra être opéré si une entreprise a mis en oeuvre des couvertures non conformes aux anciennes circulaires mais conformes aux dispositions de la future circulaire.
* Enveloppe d’exonération :
- La rémunération à prendre en compte est diminuée des contributions patronales ayant financé des régimes facultatifs ou de la participation de l’employeur au financement d’une fraction de la part salariale de cotisation à un régime AGIRC-ARRCO.
- Contributions prévoyance versées au profit des retraités : l’enveloppe d’exonération est calculée sur la base d’un salaire fictif : celui des 6 mois ayant précédé le départ en retraite.
* Mise en place du régime :
- Confirmation de la position très critiquable de l’Administration dans une réponse faite au Cabinet Barthélémy le 29 avril 2008 : il est possible de mettre en place des garanties différentes selon les établissements mais uniquement par accord d’établissement. L’article L. 911-1 du CSS est totalement ignoré : seul un accord négocié dans les conditions du droit commun au niveau de l’établissement permettra de faire des différences par établissement (pas de décision unilatérale, ni de référendum).
- L’employeur doit « indiquer » à l’agent de recouvrement par quel moyen il a remis l’écrit matérialisant la décision unilatérale aux salariés ; par exemple « document joint au bulletin de paie« . Et l’agent devra s’assurer qu’il existe des preuves suffisantes de cette remise ! On en revient à la même préconisation que par le passé : LR-AR ou courrier remis en main propre contre décharge sur une liste d’émargement.
- La date de création d’un régime est celle de la signature de l’accord collectif, de la ratification par référendum ou de la décision unilatérale. S’il s’agit d’un accord soumis à extension, la date de création du régime est celle de la publication de l’arrêté d’extension.
* Catégorie de bénéficiaires
- Outre les catégories des cadres dirigeants (art. L. 3111-2 du code du travail ; ex L. 212-15-1) et des cadres intégrés à un horaire collectif ou autres « cadres intermédiaires » (articles L. 3121-39 et L. 3121-38 du code du travail dans leur rédaction antérieure à la loi n°2008-789 du 20 août 2008 portant réforme du temps de travail), il est désormais possible de retenir les catégories suivantes :
- les salariés soumis à une convention de forfait en heures ou en jours (personnels visés aux articles L. 3121-41 et L. 3121-43 dans leur rédaction issue de la loi précitée du 20 août 2008 portant réforme du temps de travail) ;
- les catégories de cadres et assimilés de la convention AGIRC : art. 4 ; art. 4 bis ou art. 36 (en revanche, il n’est pas possible de définir des catégories en fonction des tranches A, B et C de l’AGIRC).
- Le projet de circulaire énonce un principe général de prohibition des critères propres à chaque entreprise : « D’une manière générale, les catégories définies au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, même si elles découlent d’usages ou accords collectifs particuliers, ne pourront être retenues, la catégorie étant alors trop étroitement définie ».
- Le critère d’appartenance au comité exécutif de l’entreprise n’est pas admis.
- Il est possible de retenir la catégorie des travailleurs à domicile, à condition que la convention collective prévoit des dispositions spécifiques à cette catégorie.
- La catégorie des apprentis n’est pas admise (prohibition du critère lié à la nature du contrat de travail).
- La dérogation permettant de faire une catégorie objective en fonction de l’âge pour un régime de retraite « article 83 » dédié aux personnels qui bénéficiaient d’un régime « article 39 » est limitée aux cas dans lesquels « il est démontré que la couverture de certains salariés proches de la retraite n’est pas rentable pour eux en terme de droits supplémentaires ».
- La condition d’ancienneté qu’il est possible d’insérer dans un régime (12 mois maximum) s’entend d’une ancienneté dans l’entreprise et pas dans la catégorie définie.
- Il est possible de réserver le bénéfice d’un régime de retraite aux salariés embauchés postérieurement à sa mise en place, dès lors que les salariés présents avant bénéficient d’un ancien régime fermé aux nouveaux entrants.
* Financement du régime :
- Il est possible de prévoir une cotisation forfaitaire en dessous et au-delà d’un certain niveau de rémunération et une contribution proportionnelle au salaire entre un plancher et un plafond de rémunération (permet de prévoir une cotisation minimale et une cotisation maximale tout en adaptant la cotisation au montant du salaire).
- Régime de prévoyance avec des garanties optionnelles : l’exonération ne visera que la participation patronale du premier niveau de garanties.
- Régimes Isolé/Famille : le projet de circulaire rappelle qu’il est possible de modifier la répartition des cotisations entre employeur et salariés selon la situation de famille et donne l’exemple suivant : Isolé : part patronale à 50% ; Famille : part patronale à 70%.
- Retraite : il est possible de moduler le taux de cotisation patronale selon les coefficients de la convention collective ou les niveaux de rémunération dans un souci « d’équité » pour équilibrer les taux de remplacement des salariés (cette nouvelle dérogation permet donc de faire croître la cotisation patronale avec le niveau de rémunération).
- Lorsque le régime est mis en place par décision unilatérale de l’employeur (et dans les autres cas ?), sans qu’il y participe, la contribution du CE est assimilée à une participation patronale. Le projet de circulaire semble insinuer que les régimes mis en place par accord collectif et référendum doivent prévoir une participation minimale de l’employeur.
* Fusion
Deux régimes pourront coexister au sein de la même entreprise après le délai de 15 mois (articles L. 2261-9 et suivants du code du travail : préavis de dénonciation de 3 mois et délai de survie d’un an). Le régime applicable avant la fusion peut en effet perdurer jusqu’à ce que le dernier salarié concerné cesse d’en bénéficier. Si le régime applicable avant la fusion est moins favorable que celui mis en place au sein de l’entreprise fusionnée, les salariés du régime en voie d’extinction étant pénalisés, ils pourront opter pour l’un ou l’autre des régimes. L’exercice de cette option suppose que les salariés concernés aient reçu les deux notices d’information.
* Dispenses d’affiliations et ayants droit
- Confirmation de notre analyse des textes antérieurs (voir Les Cahiers du DRH, juin 2008, n°144) s’agissant des couples salariés de la même entreprise :
- Dans le cadre d’un régime « Famille Obligatoire » (tous les ayants droits du salarié étant affiliés à titre obligatoire) : l’un des 2 doit être affilié en propre, l’autre pouvant être couvert par le premier en tant qu’ayant droit.
- Dans le cadre d’un régime « Famille Facultatif » (l’adhésion des ayants droit reste facultative) : les salariés ont le choix de s’affilier séparément ou ensemble. Si le 2ème conjoint est couvert en tant qu’ayant droit du 1er, la contribution patronale versée pour sa couverture est exonérée.
* Suspension du contrat de travail :
Les précédentes circulaires s’en remettaient à une concertation des principaux acteurs concernés pour déterminer les obligations de maintien des couvertures au profit des salariés dont le contrat de travail était suspendu pour une raison autre que médicale et sans indemnisation.
Le projet de circulaire précise qu’il est « souhaitable » que pendant les périodes d’absences non rémunérées pour raison autre que médicale, le bénéfice des garanties et la contribution patronale puissent être maintenus « au moins pour un temps ».
* Définition des Prestations de prévoyance :
- Une allocation de naissance est une prestation de prévoyance puisqu’elle peut être rattachée au risque maternité : l’administration semble donc admettre qu’elle soit forfaitaire.
- Les garanties d’assistance liées à une hospitalisation, une incapacité, invalidité ou décès sont des prestations de prévoyance (exemple : véhicule médical, médicaments à domicile, à l’étranger, ou type dépendance : aide ménagère, adaptation du domicile etc. ).
- Les garanties frais de recherche et de secours ou autre que prévoyance peuvent être admises si les « sommes concernées » sont inférieures à 10 euros par an et par salarié (nous supposons qu’il s’agit des cotisations destinées à financer ce type de prestation et non le montant de la prestation…).