Renforcer « la lutte contre les atteintes à la santé au travail », calculer la retraite en se basant sur les 100 meilleurs trimestres plutôt que les 25 meilleures années ou encore introduire « un horaire contractuel hebdomadaire minimal » pour les temps partiels. Telles sont quelques unes des propositions d’une étude du Conseil économique, social et environnemental présentée mardi 19 février 2013 et intitulée « Femmes et précarité ». Ce travail, rapporté par Évelyne Duhamel (ACFCI) et Henri Joyeux (Unaf), membres de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité met en avant les spécificités qui exposent plus largement les femmes à la précarité et montre les impacts de cette précarité en termes sanitaires et de droits à la retraite. L’étude constate qu’il y a « 70 % de femmes » parmi les « 3,7 millions de travailleurs pauvres en France ».
La première partie du rapport démontre que les « spécificités féminines » sont « potentiellement vectrices de précarité ». Les difficultés des femmes sont prises d’autant plus au sérieux qu’elles « se répercutent aussi sur leurs enfants, avec le danger de les inscrire dans un processus de transmission et de reproduction d’un état précaire ». « Avec 57 % de femmes allocataires du RSA dont 31 % à la tête d’une famille monoparentale, des temps partiels féminisés à 82 %, la question de la précarité pour les femmes doit être au coeur de nos préoccupations » peut-on lire dans le rapport. Dans le détail, les femmes « constituent la quasi-totalité des allocataires du RSA « socle majoré » (qui remplace l’API) et « le tiers des bénéficiaires du RSA « activité ».
DES CONSÉQUENCES SUR LA SANTÉ
Le rapport constate que « les femmes en situation précaire ont besoin de relais pour accéder aux droits qui leur sont ouverts » en matière de santé. A titre d’exemple, on peut citer le chiffre de « 12 % des femmes à bas revenus » qui n’ont jamais réalisé de dépistage du cancer du col de l’utérus, contre 6 % pour le reste de la population. Les rapporteurs appellent donc à développer « les partenariats avec des associations ou les caisses d’assurance maladie et d’allocations familiales » pour assurer un suivi spécifique dans les secteurs professionnel à « prédominance féminine » afin d’éviter la « double peine de la précarité et de l’atteinte à la santé ».
Le texte rapporte aussi la sureprésentation des femmes dans les chiffres de certaines pathologies. Ainsi, le surpoids et l’obésité sont « inversement proportionnels au niveau d’instruction » et « le stress au travail, l’expérience du chômage ou les processus de précarisation – caractéristiques qui affectent un grand nombre de femmes – ont un impact non négligeable ». Les femmes ont aussi un risque d’exposition aux TMS (troubles musculo-squelettiques) 22 % supérieur à celui des hommes. Même constat pour les risques psychosociaux qui concerne 28,2 % des femmes contre 19,6 % des hommes. L’écart est encore plus important dans la catégorie des « ouvriers non qualifiés » où la tension au travail concerne 36,1 % des femmes contre 23,3 % des hommes.
RETRAITES DEUX FOIS PLUS FAIBLES
Interruption d’activité, temps partiel, inégalités salariales expliquent que les pension de droit direct des femmes étaient « presque deux fois plus faible » que celles des hommes en 2008. Malgré des progrès constants, le rapport prévoit que « on ne peut guère espérer un rattrapage des droits des hommes par les femmes du moins pour les générations qui prendront leur retraite dans les 30 prochaines années ». Afin de « ne pas aggraver au moment de la retraite les effets de la précarité que les intéressées ont déjà connue tout au long de leur activité » le rapport préconise de « se référer à la moyenne des 100 meilleurs trimestres » pour déterminer le montant des pensions. Cela correspond à la même durée que les 25 meilleurs années qui sont actuellement prises en compte pour le calcul mais cela permet de « réduire la pénalisation résultant de carrière morcelées et du temps partiel ».
La majorité des familles monoparentales sont féminines, raison pour laquelle le rapport s’inquiète des « difficultés de conciliation entre travail et vie familiale » qui « rend d’autant plus incertain le maintien dans l’emploi que celui-ci est précaire ». Il tempère l’effet positif des minima sociaux qui « exposent certains parents (en particulier les mères isolées jeunes et peu qualifiées) à de longs retraits du marché du travail qui fragilisent leur insertion durable dans l’emploi et leurs revenus futurs ».
SIMPLIFIER LE RECOUVREMENT DES PENSIONS ALIMENTAIRES
L’enquête détaille les dispositifs déjà en place et constate que « le régime fiscal et le régime de protection sociale apportent à ces familles une aide notoire ». Mais le versement des pensions alimentaires reste problématique alors que « les familles qui en ont le plus besoin financièrement sont celles qui perçoivent le moins régulièrement ou pas du tout des pensions déjà modestes ». Le rapport déplore qu’une proposition de loi déposée en 2011 pour simplifier le recouvrement des créances alimentaires soit restée sans suite et appelle à la création « d’une institution unique, sous forme d’une agence nationale »
30 % des femmes salariés travaillent à temps partiel. Chez les hommes le taux descend à 7 %. A ce déséquilibre, s’ajoute le chiffre de 31 % des femmes à temps partiels qui « déclarent expressément être dans cette situation faute d’avoir trouvé un emploi à temps plein. » Pour remédier aux difficultés de la « discontinuité dans les cycles de vie professionnelles des femmes » et du « sous-emploi », le rapport propose « renforcer l’effectivité de la priorité d’accès au temps plein » et de « faciliter l’accès des femmes travaillant à temps partiels ou titulaires d’emplois précaires, à la formation continue ». Les accords en matière de lutte contre le temps partiel contraint doivent être « négociés au niveau de la branche d’activité et non de l’entreprise » préconisent les auteurs du rapport en insistant pour que ces négociations garantissent « un horaire contractuel hebdomadaire minimal » et une « majoration pour les heures travaillées très tôt ou très tard ou dans le cas d’amplitude horaire trop forte ». (source AEF)
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